J'ai connu un poney comme ça, qui était souvent mordu au pré et qui était très casse-pied avec nous, très pot de colle.
En fait, il avait été élevé au biberon et n'avait pas appris les règles de vie en société, le respect, les distances, etc...il était très lunatique, et rentrait dans la bulle des autres chevaux sans s'en apercevoir...et du coup, il se faisait agresser car il ne réagissait pas aux avertissements.
Elevé par des humains, il nous collait et préférait notre compagnie. Mais se montrait insupportable avec nous. Et chaque jour était un nouveau recommencement : les règles sont vite appris avec un pitit poulinou. Avec un cheval adulte...c'est plus long et plus dur. Je pense que ce poney ne sera jamais complètement socialisé, tant avec nous qu'avec ses congénères.
Avec un cheval socialisé et connaissant les règles, il peut très bien vouloir les transgresser volontairement s'il sent qu'il est possible d'exploiter une faille, que ce soit du coté humain qu'équin.
Et si ce cheval se comporte bien avec ta monitrice, je pencherais pour cette hypothèse.
Il faut alors t'imposer à toi-même une rigueur sans faille sur le respect, quitte à paraitre dure, comme Elicendi.
Car si ce cheval mord, il ne l'a surement pas fait sans signes annonciateurs : rapprochement par les épaules, regard, mouvement de tête, d'oreilles, etc...
Règle N°1 : c'est toujours toi qui le colle et jamais l'inverse. S'il s'approche, il doit s'arrêter à plus d'un mètre de toi, et c'est toujours toi qui fait les 2 ou 3 derniers pas. Dès qu'il se rapproche à moins d'1m, tu l'éloignes...même si tu voulais lui mettre le licol ! Tu le lui mettras plus tard, quand il aura respecté la règle d'approche.
Cela implique de ne jamais lui demander de s'approcher plus près de nous : on lui demande de s'approcher "un peu", puis nous finissons le chemin qui nous sépare de lui.
Cela implique de notre part de rester en permanence vigilant sur cette distance (et c'est vraiment exigeant pour nous, surtout si nous n'avons jamais fait vraiment attention à ça). mais nous voila déjà moins inquiétée par une éventuelle bousculade, une morsure, voire un coup de tête avec un bon élan...
Règle N°2 : déterminer pour chaque situation où sont nos limites. Le cheval a-t-il le droit de se gratter sur nous ? A-t-il le droit réclamer des gratouilles ? de hennir au boulot ? de brouter en balade ? au boulot pendant les pauses ? Peut-il m'arracher les rênes des mains lorsque nous sommes en pause ? a-t-il le droit de brouter quand je le caline/brosse dans son pré ? de fouiller dans mes poches ? etc...
Lorsque ces limites sont fixées, elles doivent restée constantes, le plus possible (voir règle N°5). Ce qui exige de nous de toujours vérifier scrupuleusement si les limites sont respectées et à quel moment précis elles sont transgressées pour y répondre au plus vite...sans en faire une fixette (quoi que pour les débuts, pourquoi pas).
Nous pouvons aussi établir un code verbal et/ou corporel avec le cheval pour qu'il sache qu'il peut avoir une autorisation (de brouter par exemple, mais alors le rênes doivent être assez relâchées pour qu'il n'ait pas à les arracher).
Règle N°3 : ne te durcit pas s'il se rapproche trop. Chasse le sans colère ni peur, pas même une trace d'agacement, et même si c'est la 15e fois en 10 minutes que ça arrive.
Une personne maître d'elle même apparait toujours plus fiable que quelqu'un qui se laisse emporter par ses émotions. Or, une crispation est souvent révélateur d'une émotion désagréable, d'un emportement (même minime et inconscient). Une personne qui agit sans jamais se crisper, mais avec la rapidité et la force nécessaire à la situation (et s'il faut frapper le cheval, sans en culpabiliser), est dans la justesse et la justice. Le risque est de vouloir se maîtriser...et d'exploser d'un coup si on trouve que ça ne marche pas assez. Mais dès qu'on sent poindre un doute notre détermination dans la décontraction : tout arrêter immédiatement.
Règle N°4 : le cheval monte toujours les phases dans ses "agressions". Ca exige une grande attention de notre part. Mais si nous ne réagissons que lorsque le cheval a mis ses dents sur notre peau, c'est trop tard. Il fallait intervenir, dans le calme et la décontraction (règle n°2) dès les premiers prémices de préparation de l'action du cheval. Pour qu'il morde, il se sera sans doute d'abord rapproché : application de la règle n°1 avec une mise à distance. Si nous nous sommes rapproché de lui (rappel : et nous l'inverse) et qu'il fait mine de chiper des lèvres, on l'éloigne immédiatement, sans violence, etc...
Règle N°5 : tout cela s'applique en permanence, en tout lieu et à tout moment.
Le respect commence lorsqu'on rentre dans le pré et jusqu'à ce qu'on en soit ressorti après la séance de travail.
Une règle sera la plus claire qui soit si elle n'a aucune exception. Si parfois le cheval peut venir nous coller et parfois non, le cheval aura bien du mal à savoir quand il peut et quand il ne peut pas. Du coup, il sera un peu paumé devant cette instabilité qui pourra lui sembler arbitraire : son humain ne lui apparait pas comme un "chef" fiable.
Donc pour l'attraper et lui mettre le licol, la Règle N°1 s'applique, avec la plus grande rigueur, car elle "annonce la couleur" dès le première contact. Il ne faut pas tout de suite tomber dans le piège du "ça fait une semaine que je ne l'ai pas vu, je l'aime, il vient me faire des câlins, chuis trop contente, etc...".
Quant à la règle du brouting, elle s'applique même au pré, qui n'est décidément pas une zone de non droit !
Au final, quand on travaille le respect avec un cheval...l'humain travaille sur lui-même bien plus que le cheval !